Se déguiser à Pourim ne fait pas partie des Mitsvot incontournables de ce jour. Par contre, c’est une coutume qui s’appuie sur de nombreuses sources.
Dans ce chapitre, nous allons énumérer les origines du déguisement à Pourim.
Le Rama (Ora’h ‘Haim 696;8) rapporte la notion de se déguiser à Pourim. On raconte à ce sujet que lors d’une oraison funèbre prononcée en son honneur, l’orateur voulait souligner trente-trois de ses qualités, car le Rama a quitté ce monde le 33ème jour du Omer [Lag Baomer] après avoir rédigé 33 ouvrages pendant sa vie. Arrivé à la 32ème qualité, l’orateur fut à bout d’idées. C’est alors qu’un homme dans le public lui vint en aide par l’histoire suivante : « Chaque année à l’issue de Pourim, le Rav se déguisait avec un masque et allait faire le tour des maisons du village pour rappeler à tout le monde de prier Arvit. »
Quelle est l’origine de la coutume de se déguiser à Pourim ?
Il existe plusieurs réponses :
Le Elya Raba (Ora’h ‘Haim 696) explique que c’est en souvenir de Mordékhaï qui fut vêtu des habits royaux, comme il est écrit : « וּמָרְדֳּכַי יָצָא מִלִּפְנֵי הַמֶּלֶךְ בִּלְבוּשׁ מַלְכוּת /et Mordékhaï sortit de chez le roi en habits royaux… » (Esther 8;15).
En souvenir de Éliyahou Hanavi qui se déguisa en ‘Harvona [l’un des eunuques du roi] et proposa au roi A’hachvéroch de pendre Haman sur la potence qu’il avait lui-même préparée pour pendre Mordékhaï. Cela nous montre que le déguisement nous rappelle la chute d’Haman.
De plus, dans la Méguila (1;10-12), nous lisons que A’hachvéroch demanda à son épouse Vachti de se rendre devant le roi, vêtue uniquement de la couronne royale, c’est à dire déshabillée, afin que tous les nobles présents puissent contempler sa beauté. Mais elle refusa, comme l’explique la Guémara Méguila 12b, car Hachem l’avait frappé de la lèpre (d’autres disent que l’ange Gabriel lui a fait pousser une queue) et elle avait honte de se montrer ainsi enlaidie. Sans cela, elle serait volontiers venue se présenter au roi, car c’était une femme indécente. Son refus causa la colère de A’hachvéroch et l’amena à la tuer, un épisode décisif qui fera entrer Esther en scène en tant que reine à la place de Vachti. C’est en souvenir du fait que Hakadoch Baroukh Hou ait déguisé Vachti en la frappant de la lèpre ou en lui faisant pousser une queue que nous nous déguisons, car cet événement fut un élément déclencheur dans le scénario de la délivrance de Pourim…
Une des quatre Mitsvot principales du jour de Pourim est celle des Matanot laévionime, qui consiste à réjouir les pauvres par des dons d’argent. Cependant, d’après l’auteur de l’ouvrage « Mihnagueï Kol Aryé », pour que la joie soit plus grande et que la honte de quémander disparaisse, lorsque tout le monde se déguise, on ne reconnaît plus les visages. Il est alors plus facile et agréable pour le pauvre de demander l’aumône. D’ailleurs, une des caractéristiques de cette Mitsva de Pourim, c’est qu’aucune enquête n’est faite auprès de ceux qui demandent la charité : « Quiconque tend la main, on lui donne ». Un pauvre déguisé reçoit donc de l’argent sans avoir à s’identifier.
Dans l’ouvrage « Minhague Israël », il est expliqué que le déguisement est en souvenir de la victoire de Pourim qui fut placée sous le signe d’une succession de miracle cachés, c’est à dire que D.ieu a déguisé la nature. Nous nous déguisons donc en souvenir de ces faits cachés.
Le verset de Bamidbar 21;1 dit : « Le Kéna’ani, roi de ‘Arad, demeurant au sud, entendit qu’Israël venait par le chemin de Atarim. Il fit la guerre contre Israël et fit des captifs. » Rachi nous explique ce verset au nom du Midrach Tan’houma dévoilant que le Kéna’ani en question était Amalek. En effet, il changea de langue pour parler le Kéna’ani afin d’inciter les Bneï Israël à prier D.ieu de leur livrer les Kéna’anim dans leurs mains, alors qu’en réalité, c’étaient des Amalékim. Mais les Bneï Israël ont constaté que les vêtements portés par ces pseudo « Kéna’ani » étaient ceux des Amalékim. Ils décidèrent donc de prier sans préciser de quel peuple ces ennemis étaient issus, comme il est dit dans le verset suivant : « Si tu donnes ce peuple-ci dans ma main… » Ainsi, en souvenir de cette défaite de Amalek qui a voulu tromper le peuple juif en « maquillant » son langage, mais en oubliant de déguiser son vêtement, nous nous déguisons pour le narguer d’avoir oublié…
Un des thèmes principaux du jour de Pourim est l’unité dans le peuple. Le fait de se déguiser va resserrer les liens au sein du peuple. En effet, que crée le manque d’unité ? C’est le sentiment de différence, que ce soit idéologique, physique, financière… Ces différences créent des barrières entre les Juifs et mène parfois à des tensions et à des mésententes. C’est alors que le déguisement va permettre un rapprochement quand la différence de chacun sera camouflée derrière les masques. Les barrières tombent et ainsi chacun se rapproche de l’autre car grâce aux déguisements, on échange les rôles : le maître est un marin, le mesquin est un clown, le timide est policier… Ainsi, les préjugés s’estompent, on brise la glace et c’est l’occasion de découvrir et de connaître les qualités intérieures de son prochain.
En conclusion, l’histoire de Pourim a été déguisée et pour la fêter, à notre tour de nous costumer !
Toutes les sources énumérées peuvent en effet justifier le déguisement. Mais qui se déguise à Pourim ? Les enfants !
Depuis Pourim dernier, les enfants ont déjà une idée de leur déguisement du prochain Pourim !
Ce sont les enfants qui sont mis en avant et qui sont les rois du spectacle.
Rappelons qu’au moment de Matane Torah, nous avons engagé nos enfants en tant que garants du fait que le peuple juif accomplirait la Torah.
A Pourim, comme nous l’avons déjà expliqué, nous avons reçu la Torah une seconde fois, mais cette fois-ci, dans la joie.
Et c’est dans cette joie et cette euphorie du jour que les enfants sont à l’honneur, eux qui représentent l’avenir de notre peuple.
Rav Mordekhai Bismuth
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