« Rassemble le peuple, les hommes et les femmes et les jeunes enfants, et ton étranger qui est dans tes portes afin qu’ils entendent, et afin qu’ils apprennent et qu’ils craignent Hachem, votre Elokim, ils prendront garde de faire toutes les paroles de cette Torah-ci.» (Dévarim 31 ; 12)
Il s’agit du « Hakel », mitsva qui nous a été enjointe de rassembler tout le peuple au Beth Hamikdach le 2ème jour de la fête de Souccot, à la fin de chaque septième année. A cette occasion, le Roi donnait une lecture de différentes parties du Sefer Dévarim.
Ce rassemblement, explique Rachi qui rapporte les enseignements de la Guémara (‘Haguiga 3a), a pour but que les hommes apprennent et que les femmes écoutent. Mais les enfants, pourquoi venaient-ils ? Pour procurer du mérite à ceux qui les avaient emmenés.
Attardons-nous sur ce dernier enseignement de Rachi.
Le Sfat Emet voit aussi une difficulté dans le fait de devoir emmener les enfants à cette lecture. En effet, pourquoi les faire participer à ce rassemblement ? Ils dérangeaient plus qu’autre chose, les adultes devaient être moins attentifs lors de ce grand cérémonial. Ne valait-il pas mieux pour tous, laisser les enfants avec une baby-sitter à la maison, et que chacun ait la paix ?
On peut entrevoir au travers de ce commandement, un grand principe dans l’éducation des enfants : la pédagogie de l’exemple.
Lorsque Rachi dit : « Pour procurer du mérite à ceux qui les avaient emmenés », cela signifie que même s’ils dérangeaient certainement leurs parents, leur présence à cette cérémonie permettait une transmission, un passage à relais. Ils représentaient la continuité de la Avodat Hachem de leur parents, et comme le dit le verset : « afin qu’ils entendent, et afin qu’ils apprennent et qu’ils craignent Hachem » afin que leur oreilles s’imprègnent de cette Torah.
Comme il est écrit dans les Pirkei de Rabbi Elièzer (Chapitre 25) : lorsque l’on rentre dans une parfumerie, qu’on le veuille ou non, et même sans rien y acheter, on en ressortira parfumé.
Cette transmission se fera donc, et la présence des enfants est indispensable, par le fait que l’enfant verra son père, observera son attitude, ses réactions et percevra ses sentiments lors de ce grand rendez-vous. Nous appelons cela l’éducation par l’exemple, que le Steïpeler préconisait avec la prière, en premier lieu, afin de réussir l’éducation de son enfant.
L’exemple ! Cela ne signifie pas se valoriser pour ses réussites devant son enfant, de façon solitaire et égoïste. Seul on arrivera sûrement à beaucoup de choses, mais au final on restera toujours seul, sans rien avoir transmis.
Notre zèle et notre dévotion pour nos objectifs personnels ne devront pas se faire au détriment de nos enfants. On ne peut pas les mettre au service de notre réussite, mais nous grâce à eux, et eux grâce à nous, au service d’une réussite collective et en chaîne pour l’éternité.
Quelle image offrons-nous à nos enfants ? Eux qui sont si curieux de nous, et si prompts à imiter nos faits et gestes. Nous sommes fiers de voir notre fils nous imiter et se vêtir d’un Talith, ou notre fille mimer la Hadlakat Nérot… Ces petits gestes se feront naturellement dès leur plus jeune âge.
Nos comportements, nos réactions et sentiments, à l’égard d’une mitsva, d’une situation quelconque ou d’une personne, seront systématiquement perçus, compris, et analysés. Ils feront leur tri personnel et à nous d’offrir le meilleur exemple.
L’élaboration de leur éducation et la construction de leur être se feront grâce à cette cohabitation des parents avec leurs enfants. Nos exigences et nos réprimandes ne seront rien à côté de notre honnêteté dans nos actes, qui auront eux force de loi. Il sera très difficile de « bluffer » notre propre progéniture, et même si l’on y parvient, ils découvriront un jour ou l’autre le pot au rose, ce qui leur fera beaucoup de mal et nous discréditera à leurs yeux.
On raconte du Rabbi de Kotsk Zatzal, qu’il avait un voisin commerçant qui refusait d’étudier la Torah. De temps à autre, le Rabbi l’invitait à étudier, mais l’autre refusait à chaque fois, en lui rétorquant que lui n’avait pas le temps, mais que son fils en aurait et que si D.ieu veut, il étudierait. Quelques années passèrent, le fils grandit, et entra dans l’affaire familiale. Comme il l’avait fait pour son père, le Rabbi l’invita quelques fois à étudier, mais comme son père le fils répondit « que lui n’avait pas le temps, mais que son fils en aurait et que si D.ieu veut, il étudierait… » Voilà donc un fils qui a bien retenu la leçon de son père !
Nous avons le devoir de scruter nos actes, et nos âmes, de faire attention à l’image que nous véhiculons. Notre comportement vaudra mieux que tous les plus beaux discours.
La Guémara (Bérakhot 7b) nous enseigne : « Rabbi Yo’hanane a dit au nom de Rabbi Chimon Bar Yo’haï : se mettre au service de ceux qui étudient la Torah est supérieur à l’étude de la Torah auprès d’eux ». Le Maharcha explique qu’un élève qui assiste son Rav et observe son comportement apprend de nombreuses lois pratiques ; tandis que celui qui étudie la Torah de son Rav discute de nombreuses lois qui n’ont pas d’application pratique. On constate d’un tel enseignement le pouvoir de l’observation, l’enfant apprend surtout en regardant l’adulte, et c’est la plus grande influence qui guidera sa vie d’homme.
Ce conseil que nous offre la Torah doit être appliqué au quotidien. On court à droite à gauche, des rendez-vous, des clients, un congrès, encore un petit contrat, et on explique aux enfants que pour l’instant on n’a pas trop de temps pour lui, « et mais que » Papa travaille pour lui et son confort, pour ses dernières Nike ou son dernier Iphone. On lui inculque que le temps c’est de l’argent, alors on remet cet instant à plus tard, mais le temps c’est de l’amour, et ce « plus tard » sera peut-être trop tard.
Nos enfants n’ont pas besoin de discours, d’exigences ou d’excuses, mais simplement de présence et d’exemple. Ainsi, en « insérant » NOS enfants dans notre emploi du temps, on leur permettra de grandir et s’épanouir dans les chemins que notre cœur désire et comme le dit Rachi « Pour procurer du mérite à ceux qui les ont emmenés. ».
Chabat Chalom et Gmar ‘hatima tova
Rav Mordekhai BISMUTH
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