Dans la Méguilat Esther (9;20-22) il est écrit : « Mordékhaï mit par écrit ces événements et expédia des manuscrits à tous les juifs, dans toutes les provinces du roi A’hachvéroch, proches ou éloignés, leur prescrivant d’observer le quatorzième jour du mois de Adar et le quinzième, d’année en année. Ces jours où les juifs s’étaient reposés de leurs ennemis et le mois qui s’était transformé de tristesse en joie et de deuil en fête, d’en faire des jours de festin et de joie et d’envoi de présents d’un homme à son prochain et de dons aux pauvres. »
Nous allons découvrir dans ce chapitre l’importance de cette action, son rôle dans l’histoire de Pourim et la Halakha/loi pour bien accomplir cette mitsva.
L’origine de la Mitsva
À la mémoire de Moché Rabénou…
Le Ralbag donne la raison pour laquelle Mordékhaï a instauré la Mitsva de Matanot Laévionime, selon le Midrach (Yalkout Chimoni, Esther) :
Éliyahou Hanavi vient auprès de Moché Rabénou et l’informe du décret qui s’annonce sur Israël afin de lui demander de prier de l’annuler. Alors Moché lui demande : « Y a-t-il un Tsadik sur terre qui pourrait s’associer à ma Téfila ? ». Éliyahou Hanavi lui répond qu’il y a un homme Tsadik du nom de Mordékhaï.
Alors Moché ordonne à Éliyahou Hanavi d’inviter Mordékhaï à prier ; il lui assure qu’au moment où Mordékhaï priera, il priera avec lui, et la délivrance arrivera grâce à leurs Téfilot simultanées.
Par reconnaissance, Mordékhaï institua les Matanot Laévionime pour l’élévation de l’âme de Moché Rabénou. [Kitsour Alchikh]
En attendant Machia’h…
La raison pour laquelle on distribue beaucoup de Tsédaka à Pourim, à travers la Mitsva de Matanot Laévionime, c’est parce qu’à la venue du Machia’h, la Méguilat Esther sera encore en vigueur. Comme nous l’enseigne le Rambam (Hilkhot Méguila 2;18), tous les écrits des Prophètes et des Hagiographes seront annulés à la venue du Machia’h, excepté la Méguilat Esther, car elle est comparable aux cinq Livres de la Torah et aux lois de la Torah orale qui ne seront jamais annulées.
Le verset nous dit : « Ces jours de Pourim ne seront jamais abandonnés par les Juifs et leur souvenir ne quittera pas leurs descendants. » (Esther 9;28). Dans la Guémara (Chabat 161b), Rachi nous enseigne qu’au temps du Machia’h, nous vivrons dans la richesse et l’abondance, et personne ne vivra de Tsédaka.
Aussi, aujourd’hui, nous accomplissons largement cette Mitsva en nous disant qu’au temps du Machia’h, la Méguila sera là, mais la Mitsva de Tsédaka ne sera plus nécessaire. Autant en profiter tant que nous pouvons l’accomplir ! [Mêïl Tsédaka]
Pour réparer le ‘Hilloul Hachem
Rabénou Yaakov de Lissa nous enseigne une des raisons pour laquelle Mordékhaï a institué la Mitsva de Matanot Laévionime. Mordékhaï a attribué le décret de Haman à la faute des Bneï Israël plusieurs années auparavant, lorsqu’ils se sont prosternés devant des idoles et, par ce comportement, se sont rendu coupables de ‘Hilloul Hachem (profanation du Nom de D.). Et comme la Guémara (Yoma 86a) le dit, seule la mort peut expier la faute de ‘Hilloul Hachem. Cependant, Mordékhaï savait que l’abolition de ce décret ne pouvait s’obtenir qu’en éveillant la clémence de Hakadoch Baroukh Hou. Aujourd’hui encore, il reste des traces de ce décret, car nous ne sommes pas totalement purifiés de cette faute. C’est donc par cet acte de Tsédaka que nous réparerons peu à peu le ‘Hilloul Hachem de nos ancêtres, comme il est dit : « וַחֲטָאָךְ בְּצִדְקָה פְרֻק וַעֲוָיָתָךְ /Rachète tes fautes par la Tsédaka »(Daniel 4;24). C’est pour cela que Mordékhaï institua la Mitsva de Matanot Laévionime.
Une récompense pour les générations
Pourquoi avoir instauré une Mitsva de don, et spécifiquement aux pauvres ? Dans la Méguila (9;10), il est écrit : « … Mais ils ne portèrent pas la main sur le butin ». En effet, après avoir vaincu leurs ennemis et pendu Haman et ses fils, les juifs ne portèrent pas la main sur le butin, qui alla directement dans les caisses du roi, afin de montrer que leur motivation n’était nullement financière. Cette abstention fut acceptée par tout le peuple.
Cependant, la retenue fut plus difficile pour les pauvres ; ils ont malgré tout obéi à l’ordre de Mordékhaï. En récompense de ce comportement et de cette retenue, il fut décrété que dans toutes les générations à venir, sans exception et sans enquête, tous les pauvres bénéficieront des Matanot Laévionime.
Le michté pour tous
Le « Dena Pachra » explique que riches et pauvres ont bénéficié de l’annulation du décret mortel du cruel Haman. Cependant, Mordékhaï voulait s’assurer que même les pauvres auraient les moyens de faire un festin. C’est pour cela qu’il décréta la Mitsva de Matanot Laévionime, afin que tout le peuple puisse fêter dignement cette victoire miraculeuse.
Mitsva protectrice
Le « Bneï Issasskhar » rapporte l’enseignement du ‘Hida, « Kissé David », qui nous dévoile pour quelle raison cet acte de ‘Hessed fut institué. Le verset de Téhilim (112;9) : «פִּזַּר נָתַן לָאֶבְיוֹנִים צִדְקָתוֹ עֹמֶדֶת לָעַד קַרְנוֹ תָּרוּם בְּכָבוֹד/Il donne généreusement aux pauvres, sa bienfaisance dure à jamais, son front s’élève avec honneur ». Dans le traité Baba Batra 10b, est rapportée une question que l’on a posée à Chlomo Hamélekh : « Jusqu’où va la force de la Tsédaka ? ». Il répondit : « sortez et voyez ce qu’a expliqué mon père [David Hamélekh] dans le verset de Téhilim : « Il donne généreusement aux pauvres ». Le ‘Hida explique, à partir d’un enseignement des élèves du Ari Zal, qu’une Avéra/faute commise efface une Mitsva.
Cependant, une Avéra n’efface ni la Torah ni le ‘Hessed ni la Tsédaka. Ainsi, les paroles de Chlomo Hamélekh s’éclaircissent : « Regardez la force de la Tsédaka – Il donne généreusement aux pauvres, sa bienfaisance dure à jamais », c’est-à-dire qu’aucune avéra ne l’efface.
Sur ces paroles du Hida, le « Bneï Issasskhar » explique que les membres de la Grande Assemblée se sont étonnés lorsque le décret d’extermination a frappé les Bneï Israël parce qu’ils ont participé au Michté ou se sont prosternés devant des idoles. Comment une telle chose pouvait leur arriver ? N’avaient-ils pas de nombreuses Mitsvot à leur compte pour les protéger ? La Guémara (Kidouchine 39b) enseigne bien : « A quiconque accomplit une Mitsva entièrement, on allonge ses jours et ses années ». Comment un tel décret a pu les atteindre ?! Il nous faut constater que la avéra efface la Mitsva. Pourtant, cela reste difficile à comprendre. N’avaient-ils pas à leur actif la Mitsva de l’étude de la Torah ? Certes, mais cette Mitsva n’était pas suffisante ; il en fallait d’autres pour témoigner en leur faveur, comme il est dit : « עַל פִּי שְׁנֵי עֵדִים אוֹ עַל פִּי שְׁלֹשָׁה עֵדִים יָקוּם דָּבָר/c’est par la déposition de deux témoins ou de trois qu’un fait sera établi » (Devarim 19;15). C’est pourquoi les Sages instituèrent deux autres Mitsvot que la avéra n’effacera pas : les Matanot Laévionime et les Michloa’h Manot. L’ensemble de ces trois Mitsvot annula le décret au temps d’Haman et, dans chaque génération, ce sont des Mitsvot protectrices pour le peuple d’Israël.
Comment accomplir la Mitsva ?
Qui en a l’obligation ?
Les hommes et les femmes ont l’obligation d’accomplir cette Mitsva, mais aussi les enfants bar Mitsva ou bat Mitsva, même s’ils dépendent financièrement de leurs parents. Par contre, les jeunes enfants à partir de 6 ans n’y seront pas tenus. Cependant, il sera bon que leur parents leur donnent un peu d’argent afin qu’eux aussi accomplissent la Mitsva en distribuant cet argent aux pauvres, car les enfants, rappelons-le, furent eux aussi sauvés par le miracle.
Un pauvre qui vit de la Tsédaka est tenu d’accomplir la Mitsva de Matanot Laéviyonim. Pour cela, il lui suffira de donner une somme à deux pauvres, qui la lui rendront. De cette façon, chacun d’entre eux sera quitte de son obligation de donner un don à deux pauvres.
Combien et comment ?
La Mitsva consiste à donner un don à deux pauvres le jour de Pourim. Ce don peut être soit de l’argent soit de la nourriture, mais pas des vêtements ou des objets.
D’après certains, on s’acquittera de la Mitsva en donnant à chaque pauvre la valeur d’une prouta, c’est à dire la plus petite pièce de monnaie. Cependant, d’autres commentateurs pensent qu’il faut donner la valeur d’un repas minimum, c’est à dire le prix d’un sandwich accompagné d’une boisson (environ 10-15 shekels), et c’est cet avis qui a été retenu.
Malgré tout, certains décisionnaires considèrent qu’il faudra donner la valeur d’un vrai repas consistant (environ 50 shekels). Cependant, une personne qui craint D.ieu veillera à donner davantage et à se montrer généreux comme la main d’Hachem. Quiconque agit ainsi est certainement digne d’éloges et mérite une bénédiction particulière. Il réjouira d’une part les pauvres, et d’autre part il procurera une grande joie à Hakadoch Baroukh Hou. En effet, le Rambam (Hilkhot Méguila 2;17) écrit qu’il vaut mieux donner davantage de dons aux pauvres que de dépenser de l’argent pour le repas de Pourim ou pour les Michloa’h Manot, car il n’est pas de plus grande joie que celle de réjouir les pauvres, les orphelins, les veuves et les convertis. Celui qui réjouit ces malheureux ressemble à la Présence Divine, comme il est dit dans Yéchaya (57;15) : « [D.ieu œuvre] pour raviver l’esprit des humbles et faire revivre le cœurs des opprimés ».
Cet enseignement a de quoi nous faire réfléchir sur la véritable joie de Pourim. Il invite tout à chacun à faire ses comptes pour les dépenses de la fête. Il est bon de souligner que le « Michné Torah » du Rambam n’est pas un livre de moussar, mais un véritable ouvrage de Halakha, de lois à appliquer dans la pratique.
Cette somme devra être versée au pauvre le jour même de Pourim, ni avant ni après. A priori, il sera bon de donner de l’argent en espèces pour qu’il puisse en profiter le jour même. Si c’est un chèque, celui-ci devra être encaissable le jour même.
La Mitsva est de donner au minimum à deux pauvres, mais il est évident que l’on peut, et que l’on doit, multiplier les dons ce jour-là. Il est écrit dans le « Yéssod vé Chorech Haavoda » qu’au moment de l’acte de Tsédaka, on réalise de grandes réparations (tikounim) dans les cieux. C’est pour cela que chacun devra multiplier les dons de Tsédaka, même plus que ses moyens. Et à quiconque tend la main, on donne, même si l’on sait qu’il n’en a pas besoin, car l’acte de céder ce jour-là a une grande influence dans les cieux. L’auteur du « Maté Moché » explique qu’une des raisons pour laquelle nos Sages ont institué de s’enivrer à Pourim est dans le but de réjouir les pauvres. En effet, en état d’ivresse, l’homme est plus généreux dans ses dons aux pauvres.
Rappelons les paroles de la Guémara (Baba Batra 11a) qui enseigne que sauver un homme équivaut à sauver l’humanité entière. En tant que Juifs, nous avons une responsabilité à la fois individuelle et collective. Nous devons nous sentir concernés par le sort de l’autre. Chaque fois que notre prochain est dans le besoin et sent la nécessité d’être aidé, physiquement ou moralement, c’est une Mitsva de lui venir en aide.
En ce qui concerne de nombreuses actions de ‘Hessed, il ne faut pas attendre que le nécessiteux se trouve dans l’obligation de demander. C’est une position gênante et désagréable et souvent, il préférera souffrir ou subir plutôt que de faire appel à l’aide d’autrui.
La différence avec les Michloa’h Manot
Pour la Mitsva de Michloa’h Manot, il faut envoyer deux présents à une personne, mais pour Matanot Laévionime, il suffit d’envoyer un seul don, mais à deux pauvres. Pourquoi faut-il deux présents pour l’un alors que pour l’autre, un seul suffit ?
Le Elya Raba répond que la différence tient au fait que tout le monde reçoit Michloa’h Manot, pauvres et riches, tandis que seuls les pauvres sont concernés par les Matanot Laévionime, or ils se contentent d’un seul présent.
A quel moment ?
On distribue les Matanot Laévionime le jour et pas la nuit. Il sera bon d’accomplir la Mitsva après la prière du matin. Aussi, certains préconisent de l’accomplir tout de suite après la lecture de la Méguila, comme il est dit dans la Guémara (Méguila 4b) : « Les pauvres attendent avec inquiétude la lecture de la Méguila ». Ils attendent en effet la fin de lecture dans l’espoir de recevoir les cadeaux qui leur sont distribués au moment de la lecture, comme on le verra plus bas, par un intermédiaire ou le biais d’une association.
À qui faut-il donner ?
Le Choul’hane Arou’h (694;3) écrit explicitement que l’on ne doit pas vérifier l’honnêteté du solliciteur ; à quiconque tend la main, on donne. Dans l’ouvrage « Péri Tsadik » il est enseigné que notre comportement envers nos prochains ici-bas influe sur la conduite du Ciel envers nous. De ce fait, le jour de Pourim, de la même façon que nous ne vérifierons pas la légitimité de la requête de quiconque tend la main, aussi au Ciel, lorsque nous verserons nos prières, Hachem ne vérifiera pas si nous méritons de les voir exaucées. Le « Imreï Noam » nous révèle que c’est en cela que Pourim est un grand jour, un moment propice à la satisfaction de toutes nos prières.
Le Rabbi de Rouzine fait remarquer que Pourim est plus grand que le jour de Kippour [Yom Hakippourim revient à dire yom ké Pourim/jour qui est comme Pourim].
Pour quelle raison ? Le jour de Kippour fait expiation seulement à celui qui fait Téchouva , par contre à Pourim tout le monde est pardonné, même celui qui n’aurait pas fait Téchouva !
En effet, comme il est écrit dans la Méguila (9;27), les Bneï Israël « reconnurent et acceptèrent/ Kiymou vé kiblou » – « Kiymou/ils reconnurent » en Haut dans les Cieux ce qu’ils « kiblou/acceptèrent » ici-bas. Et qu’ont-ils accepté ici-bas ? Ils ont accepté de donner des matanot/dons à quiconque le demanderait, sans faire de différence. De même, « kiymou/ils reconnurent » en Haut de pardonner à tout à chacun sans faire de différence.
Il est rapporté dans l’ouvrage « Ohel Moché » que Rabbi ‘Haim de Vologin avait coutume de marcher dans les rues, les poches pleines de pièces, et tous les pauvres s’attroupaient autour de lui et lui tendaient la main. Son but était de pouvoir accomplir les paroles du Choul’hane Arou’h « quiconque tend la main, on lui donne. »
On pourra s’acquitter de la Mitsva en donnant à un homme pauvre et à sa femme, ou à un homme pauvre et à son enfant ;ceci est considéré comme deux cadeaux à deux pauvres. Cependant, il faudra que l’enfant en question soit suffisamment grand pour être conscient qu’il s’agit d’un don de Matanot Laévionime.
Si l’on décide de faire un don à une association, il faudra veiller à donner son argent uniquement à des associations de Tsédaka pour les nécessiteux, et pas à des associations fondées pour construire une synagogue, un mikvé ou toute autre cause. Rappelons que ce don est essentiellement destiné à l’achat des aliments nécessaires pour le repas de Pourim.
Intermédiaire ou association
Il est tout à fait permis de transmettre l’argent aux pauvres par l’intermédiaire d’une tierce personne ou d’une association. Il faut savoir que le degré le plus élevé dans l’accomplissement de cette mitsva de Tsédaka est le don en secret, lorsque le donateur ne connaît pas le nécessiteux et que le nécessiteux ne connait pas son bienfaiteur, pour éviter toute honte occasionnée au destinataire.
Nos Sages nous enseignent dans la Guémara (Sota 10b) : « Il vaut mieux se jeter dans une fournaise ardente plutôt que de faire pâlir (de honte) son prochain en public. »
Dans le traité de Ketouvot 67b est relatée l’histoire suivante :
Mar Oukva, l’un des grands Sages de Babylonie, avait un voisin pauvre auquel il donnait chaque jour quatre zouz. Ne voulant surtout pas le gêner ou lui faire honte, il agissait anonymement, de sorte que le pauvre ne savait pas qui était son bienfaiteur.
Le Tsadik préparait tous les jours les quatre zouz dans un sachet, s’approchait silencieusement de la maison du pauvre afin que personne ne l’entende, et jetait le sachet par l’entrebâillement de la porte, puis il se sauvait au plus vite.
Lorsque le pauvre trouvait l’argent, Mar Oukva était déjà loin ! Le pauvre ouvrait la porte, regardait autour de lui et ne voyait personne. Il n’avait donc pas honte de recevoir ce don de tsédaka.
Un jour, Mar Oukva s’attarda au Beth Hamidrach, absorbé par un passage très profond. Inquiète, sa femme partit à sa rencontre afin de savoir la raison de son retard. En voyant sa femme arriver, Mar Oukva se rendit soudain compte qu’il devait être très tard. Il se souvint aussitôt du pauvre qui n’avait pas encore reçu sa tsédaka quotidienne et s’inquiéta pour lui. Il se rendit donc à son domicile, accompagné de sa femme, mais le pauvre avait décidé ce jour-là de guetter son bienfaiteur mystérieux pour lui exprimer sa reconnaissance.
Il vit Mar Oukva et sa femme se diriger vers son humble demeure : « Voilà sans doute mes bienfaiteurs ! » se dit-il, et il courut à leur rencontre afin de les remercier.
Quand Mar Oukva et sa femme s’approchèrent pour jeter le sachet journalier et virent la porte s’ouvrir, ils firent aussitôt demi-tour afin de ne pas être découverts et coururent aussi vite qu’ils le purent. Se trouvant au coin de la rue devant une boulangerie, ils aperçurent le four qui venait juste d’être éteint. Bien qu’il fût brûlant, ils n’hésitèrent pas à s’y cacher afin d’éviter toute honte au pauvre.
Le four ne brûla les pieds que de Mar Oukva, un vrai miracle ! Quant à sa femme, elle ne souffrit d’aucune brûlure, et elle proposa même à son mari de poser ses pieds sur les siens pour les protéger de la chaleur ! Hachem lui avait accordé cette protection surnaturelle parce qu’elle se donnait plus de peine encore à faire du ‘Hessed que son mari. En effet, Mar Oukva ne donnait que de l’argent aux nécessiteux, tandis qu’elle leur épargnait l’effort d’aller acheter à manger puisqu’elle recevait les pauvres chez elle et leur préparait leurs repas.
Ces deux grands Tsadikim, Mar Oukva et sa femme, avaient préféré se précipiter dans un four brûlant plutôt que de mettre un pauvre dans l’embarras.
C’est l’une des raisons pour lesquelles nos Sages ont institué la Mitsva de Michloa’h Manot. Certains pauvres réservés auraient honte de demander l’aumône afin d’accomplir la Mitsva du Michté (repas de fête) de Pourim comme il se doit, avec nourriture et vin en abondance. Ainsi, lorsqu’on leur fera parvenir de l’argent par le biais des Michloa’h Manot, ils ne ressentiront aucune honte et pourront organiser le repas de Pourim convenablement, avec un sentiment agréable et dans la dignité. Cela nous montre qu’il y aussi une Mitsva de déguiser nos actes, et pas seulement notre personne, à Pourim, ainsi que toute l’année.
Comment fonctionnent les dons par les associations ?
Lorsque vous faites un don de « Matanot Laévionime » à une association avant Pourim ou le jour même, comment vous acquittez-vous de la Mitsva ?
L’association fait une estimation des dons qu’elle recevra entre les jours précédant Pourim et le jour de Pourim même. Elle partage cette somme entre les nécessiteux répertoriés dans ses listes, puis prépare des enveloppes qui seront distribuées le jour même de Pourim. Ainsi, l’association devient l’intermédiaire entre vous et le nécessiteux. Il vaut parfois même mieux agir ainsi, car les bonnes associations connaissent les vrais nécessiteux et leurs besoins, et distribue l’argent tôt le matin, ce qui leur laisse le temps de préparer la fête dignement. Nous gagnons ainsi que notre argent est distribué à temps, à la bonne adresse, en toute discrétion et nous accomplissons ainsi la Mitsva comme il faut.
Accomplir avec l’intention
Au moment d’exécuter la Mitsva, il faudra avoir l’intention d’accomplir la Mitsva de Matanot Laévionime avec une immense joie. Pour cela, il est bon de lire auparavant le « Léchem yi’houd » composé pour l’occasion et figurant dans les siddourim.
לְשֵׁם יִחוּד קוּדְשָׁא בְּרִיךְ הוּא וּשְׁכִינְתֵּיהּ, בִּדְחִילוּ וּרְחִימוּ, וּרְחִימוּ וּדְחִילוּ, לְיַחֲדָא שֵׁם י”ה בְּו”ה בְּיִחוּדָא שְׁלִים (יהוה) בְּשֵׁם כָּל יִשְׂרָאֵל, הִנֵּה אֲנַחְנוּ בָּאִים לְקַיֵּם מִצְוַת עֲשֵׂה מִדִּבְרֵי קַבָּלָה, לִתֵּן מַתָּנוֹת לִשְׁנֵי אֶבְיוֹנִים בְּיוֹם אַרְבָּעָה עָשָׂר (חֲמִשָׁה עָשָׂר) לְחֹדֶשׁ אֲדָר, וְעַל יְדֵי מִצְוָה זוֹ יִתֵּן הַיְסוֹד דְּאַבָּא לְרָחֵל מַתָּנוֹת הֶאָרַת הַמֹּחִין כְּדֵי לְהַגְדִּיל בִּנְיַן פַּרְצוּפָהּ בַּיּוֹם הַזֶּה, לַעֲשׂוֹת נַחַת רוּחַ לְיוֹצְרֵנוּ וְלַעֲשׂוֹת רְצוֹן בּוֹרְאֵנוּ, וּלְתַקֵּן שֹׁרֶשׁ מִצְוָה זוֹ בְּמָקוֹם עֶלְיוֹן, וְיַעֲלֶה לְפָנֶיךָ כְּאִלּוּ כִּוַּנְנוּ בְּכָל הַכַּוָּנוֹת הָרְאוּיוֹת לְכַוֵּן בְּמִצְוָה זוֹ. יִהְיוּ לְרָצוֹן אִמְרֵי פִי וְהֶגְיוֹן לִבִּי לְפָנָיךָ, יְהֹוָה צוּרִי וְגֹאֲלִי. וִיהִי נֹעַם אֲדֹנָי אֱלֹהֵינוּ עָלֵינוּ, וּמַעֲשֵׂה יָדֵינוּ כּוֹנְנָה עָלֵינוּ, וּמַעֲשֵׂה יָדֵינוּ כּוֹנְנֵהוּ:
Au nom de D.ieu
Pour celui qui voudrait ajouter une touche de splendeur dans l’accomplissement de la Mitsva, le Ari Zal enseigne dans Chaar Hakavanot que lorsque l’on donne la Tsédaka, on unifie le nom de D.ieu.
Voici comment procéder : tout d’abord on donnera la Tsédaka debout et on transmettra l’argent de notre main droite à la main droite du receveur [pauvre ou intermédiaire]. Il faut penser que l’argent représente la lettre « י » du nom d’Hachem « יה־וה », notre main représente la « ה », notre bras tendu vers la main du receveur représente la lettre « ו », et enfin la main du receveur représente la dernière lettre « ה ». Ainsi, nous avons formé et unifié le nom d’Hachem « יה־וה ».
Mais pour cela, il faudra faire en sorte de tendre notre main avant que celle du pauvre [ou de l’intermédiaire] ne la tende, car sinon, on ne pourra plus former le nom d’Hachem étant donné que le bras du pauvre deviendrait le « ו » et tout serait faussé. Malgré tout, même si le pauvre a tendu la main le premier, il faudra tout de même lui donner et ne surtout pas renoncer à la Mitsva pour cela.
En conclusion, la lecture de la Méguila vient raconter et nous rappeler l’histoire du michté, les festins organisés à l’époque, et les michloah Manot unissent le peuple.
Même si toute l’année, donner aux pauvres est une mitsva importante, pourquoi est-ce une obligation à Pourim ?
A travers ce chapitre, nous avons compris que cette mitsva est une expiation.
Un décret de destruction a frappé le peuple juif. Par un retournement de situation, Haman est pendu et les Juifs l’emportent sur leurs ennemis. Qu’est-ce qui empêcherait un décret semblable d’être scellé contre notre peuple ? Le pouvoir de la Tsédaka.
Cette mitsva à Pourim vient non seulement réparer les fautes passées mais nous préserve nous, notre génération et les générations futures !
Plus nous faisons preuve de générosité à Pourim, plus la miséricorde d’Hachem sera grande.
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