Cette semaine nous ouvrons le Séfer Bamidbar, cette Paracha précède toujours la fête de Chavouot, afin de ne pas juxtaposer, nous enseignent Tossfot (Méguila 31b), les malédictions de Bé’houkotaï, avec la fête. Notre Paracha nous permet aussi de mieux nous préparer à Chavouot, qui est le don de la Torah, grâce au Midrach Rabba (1 ; 72) qui nous enseigne, à partir de notre verset, la façon dont nous l’avons reçue.
La Torah a été donnée au-travers de trois choses : l’eau, le désert et le feu. L’un des points communs entre ces trois éléments, c’est leur gratuité d’acquisition.
En effet, le feu et l’eau sont des éléments naturels à la libre disposition de chacun (même si aujourd’hui nous payons le service qui nous approvisionne à domicile). Quant au désert, il est tout autant à l’abandon : vous pouvez aller y habiter, personne ne viendra vous réclamer quoi que ce soit. Il en est de même pour la Torah, elle est posée « al keren zavit », celui qui la veut va la chercher. Elle n’est pas liée à un homme en particulier, mais à tout le monde et dans la même mesure. Elle est un héritage pour chacun d’entre nous, quel que soit notre niveau. Elle est accessible à tous et de ce fait, chacun se doit de s’investir pour elle et la pratique des Mitsvot.
Cependant, creusons un peu plus notre sujet, pourquoi avons-nous besoin de ces trois éléments ?
Le Rav Moché Stern, dans son commentaire sur le Midrach, nous aide à déterminer la symbolique de ces trois éléments. Ce que le Midrach nous enseigne nous permet de tracer les règles de conduite que nous devons appliquer, d’une part pour acquérir la Torah, d’autre part pour nous pénétrer de sa morale.
Le feu est le symbole de l’enthousiasme sacré et de l’entrain joyeux avec lesquels nous devons accueillir les paroles de Torah. Il représente également l’ardeur qui doit nous animer lors de l’accomplissement des Mitsvot. Il signifie aussi le sacrifice de la vie pour Hachem, comme en témoigna notre père Avraham, qui refusa de céder à la Avoda zara et se laissa pour cela jeter dans la fournaise.
L’eau en est un autre moyen d’acquisition, elle représente l’humilité et la modestie, puisque naturellement, elle coule du haut vers le bas. Elle nous fut prodiguée dans le désert par le plus humble des hommes, comme il est écrit (Bamidbar 12 ; 3): « … et l’homme Moché très humble, plus que tout homme qui fût sur la surface de la terre. ». Elle symbolise aussi la pondération, le sang-froid, les gestes réfléchis, indispensables pour éviter de tomber dans les fosses de la passion et du vice. Enfin, elle nous rappelle le dévouement collectif de nos ancêtres, attestant d’une foi inébranlable en la promesse Divine lors du passage de la mer rouge. Ils n’hésitèrent point à s’y précipiter lorsque leurs oreilles entendirent : “Ordonne aux Bneï Israël de se mettre en marche.” (Chémot 16 ; 15)
Pour finir, le désert symbolise la modération dans la jouissance des biens matériels, afin d’être capables de recevoir la Torah. Comme il est écrit au sujet de Yaakov : “ … du pain pour se nourrir et des vêtements pour se couvrir…” (Beréchit 28 ; 20) La course effrénée aux biens matériels ne s’accorde pas avec les principes de notre Torah. Le désert symbolise le réceptacle que tout homme doit être. Celui qui voudra être ”Mékabel ète HaTorah/acquérir la Torah” devra être humble et se considérer à sa juste mesure : tels la poussière de la terre, le sable… (tout en étant conscient de sa valeur intrinsèque). Il faut savoir dépasser le matériel de ce monde pour laisser la place à la spiritualité. La Torah ne pénètre en nous que si nous lui faisons de la place. Le désert symbolise également la confiance illimitée en Hachem puisque le peuple L’a suivi dans le désert, dans un pays aride et dénué de tout. Tout comme le désert ne produit aucun fruit, la Torah doit se pratiquer dans un élan de piété excluant tout calcul, dans un total désintéressement, sans attendre de récompense ici-bas. Ce que l’on appelle la Torah Lichma.
Le Rav Dessler nous enseigne que l’on ne peut prendre que ce qui a été donné, et que l’on ne peut acheter (avec de l’argent et des efforts pour réaliser cet achat) que ce qui est offert à la vente.
Celui qui désire recevoir la Torah doit se trouver là où on la « vend », c’est-à-dire dans les maisons d’études ou dans les synagogues. Toutefois elle ne s’acquerra qu’au prix d’un effort intensif.
Chavouot et Kabalat Hatorah ne se feront qu’avec un enthousiasme, une humilité et un don de soi illimités !
Rav Mordékhaï Bismuth
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