« Et Moché vit tout le travail et voici ils l’avaient accompli comme D.ieu avait ordonné, ainsi l’avaient-ils fait ; et Moché les bénit » (Chémot 39;43)
Après avoir achevé la construction du Michkan, Moché bénit les Bneï Israël. Mais pourquoi les bénit-il ?
Après tout, ils n’ont fait qu’agir selon les commandements qui leur avaient été ordonnés. Pourquoi donc des éloges en ce qui concerne une tâche qu’ils étaient obligés d’accomplir. D’autant que s’ils n’avaient pas agi selon les ordres, par négligence ou fainéantise, cela leur aurait été compté comme une avéra.
Mais Moché les a béni, parce que rien n’est normal ni naturel ni dû dans la vie. Ils se sont efforcés et fatigués au travail, et même s’ils étaient certes obligés de le faire, Moché éprouve cependant le besoin de les bénir. Par souci de reconnaissance.
En faisant un parallèle avec notre vie quotidienne, nous voyons bien que ce type de scène pourrait tout aussi bien se produire aussi dans nos foyers…
Le Rav Pinkouss Zatsal rapproche cet évènement de la relation à l’épouse qui s’implique tant en préparant Chabat par exemple, elle cuisine, lave, nettoie, repasse, enfourne… Nous pourrions nous dire au fond de nous, rien d’exceptionnel, après tout c’est normal, c’est son rôle. Nous, on s’assoit, on mange, on boit, on chante… et madame ? Merci peut-être ?
Premièrement rien n’est normal, même si c’est effectivement SON rôle d’après les mœurs, cela empêche-t-il de lui offrir une petite bénédiction, un sourire, un merci ?
Les Bnei Israël ont travaillé dur, ils ont offert leurs biens, ils se sont investis totalement et surtout ils ont suivi les directives De Hakadosh Baroukh Hou à la lettre : « … comme D.ieu avait ordonné, ainsi l’avaient-ils fait ».
Le Beth Halevi nous explique que le Michkan est le Tikoun de la faute du Veau d’or. Le Tikoun consiste à accomplir toutes les ordonnances sans ”réfléchir”. En effet, au moment de la faute du Veau d’or, les Bnei Israël n’en avaient fait qu’à leur tête, ils avaient pensé qu’ils agissaient bien en ne se référant qu’à leur pensée personnelle. Terrible erreur !
La réparation devait donc passer par un acte d’obéissance le plus absolu, agir parce que D.ieu nous le demande, et non pas pour la raison que nous comprenons et acceptons de nous y résoudre parce que c’est aussi notre décision personnelle. L’égo fut mis de côté. Quelle réussite !
Nous devons faire une Avodat Hachem, et non pas une avoda de comprendre ce que l’on fait : NAASSE VE NICHMA ! Nous ferons puis nous comprendrons, et non l’inverse.
Nous retrouvons ce principe dans la façon de poser les Téfiline, nous commençons par le bras, symbole de l’action, ensuite seulement nous le plaçons sur la tête, symbole de la pensée. Nous agissons pour faire la volonté du Créateur, comme Il nous l’a ordonné, puis tout s’éclaire, il faut suivre le Guide afin de découvrir la Lumière !
C’est pour cette raison que nous retrouvons 18 fois dans cette paracha, tout au long de la construction du Mishkan le verset :
« … ainsi que l’Éternel l’avait prescrit à Moché. »
La Torah prend soin d’insister sur le fait que les Bnei Israël ont bien suivi les instructions comme il se doit. L’action aveugle des Bnei Israël représente un don de soi exceptionnel qui sera le moteur de ce fameux Tikoun. Il s’agit véritablement de mettre son moi entre parenthèses, afin d’accomplir la volonté du Tout Puissant Qui Seul connaît le Bien absolu.
C’est devant le résultat de tous leurs efforts que Moché les bénit : « Que ce soit Sa volonté que la Chékhina repose sur l’œuvre de vos mains. » Cette bénédiction offre au peuple le mérite de voir chacun de ses efforts permettant de se rapprocher de D.ieu et d’exécuter Ses commandements, couronné de la révélation de la Présence Divine.
Revenons à présent à nos foyers avec la Guémara (Sota 17a) qui écrit que la « Bayit Yéhoudit » est un mini-Michkan. En effet il est écrit : « Un homme et une femme méritent la Chékhina au milieu d’eux », de même que la Chékhina réside dans le Michkan, elle résidera aussi dans une « Bayit Yéhoudit ».
Comme pour les Bnei Israël, qui après avoir achevé la construction du Michkan on été bénis, de même la femme, qui effectue cette construction au quotidien et témoigne de sa volonté et de son efficacité à gérer les petits comme les gros travaux de la maison, mérite une bénédiction, un sourire, un merci. Comme nous l’enseigne Rabbi Yossi (Guitine 52a) en disant qu’il n’a jamais appelé sa femme « ichti/ma femme », mais « Bethi/ma maison ». Le rôle de la femme n’est pas accessoire, il est primordial, elle est l’essence de la maison.
Évidement tout ce qui est vrai envers la femme, l’est aussi envers l’homme, car c’est au milieu du couple que la Chékhina résidera. Pour réussir une telle œuvre, il est donc indispensable de s’élever, en donnant de soi pour le bien du couple, car celui qui donne finit par aimer celui qui reçoit de lui. Il sera donc aussi indispensable de, chaque fois que l’occasion se présente, souligner les bienfaits que l’on a reçus de son conjoint, car c’est cette reconnaissance qui conduira à l’amour de celui qui nous a prodigué toutes les bontés qu’il suffit de regarder.
Rav Mordekhai Bismuth
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