« Mais ses frères ne purent lui répondre » (Beréchit45-3)
Monsieur Brouner était un orfèvre réputé, il était connu pour l’agilité de ses mains et son goût raffiné. Il était le bijoutier le plus prisé de la ville de Varsovie. Un jour, une calèche luxueuse s’arrêta devant sa bijouterie et une femme élégante entra. “Je suis l’épouse du professeur Bourjikovski”, déclara-t-elle. Le professeur Bourjikovski était un neurologue très réputé à Varsovie. “Mon mari désire m’offrir un cadeau pour mon anniversaire. J’aurais préféré que ce soit une belle surprise! Mais vous comprenez, c’est un homme de science, il agit méthodiquement. Il préfère que je choisisse ce qui me plait”. “Bien sûr”, répondit Monsieur Brouner. “Quel est votre budget?”. “Oh, cela n’a pas d’importance! Il acceptera de payer n’importe quelle somme”, rétorqua-t-elle. La cliente demanda à choisir un assortiment: une bague et un bracelet, un collier et des boucles d’oreilles. Monsieur Brouner ne se décontenança pas et étala devant ses yeux un grand choix de bijoux. Il se trouve qu’elle avait très bon goût… Après maintes hésitations, elle sélectionna trois assortiments. Les plus chers évidemment! Elle n’arrivait pas à décider lequel acheter. Il fallait choisir le plus beau d’entre eux! La femme ria et émit une idée: “Vous savez quoi, je vais donner le choix à mon mari. De toute façon, c’est lui qui doit payer et nous devrons allez le voir pour qu’il signe le chèque”. Le bijoutier empaqueta les trois assortiments, les mit dans la poche intérieure de son manteau. En fait, il portait sur lui l’équivalent de la moitié de la valeur de son commerce… Ils traversèrent la ville en calèche et arrivèrent dans le quartier riche. Ils montèrent les grandes marches de l’escalier de marbre et Monsieur Brouner regarda avec suspicion la plaque de cuivre polie accrochée: “Famille du Professeur Bourjikovski”. “Je vais aller voir si mon mari est disponible”, dit-elle. Elle partit, revint et dit: “C’est bon, il est seul. Il demande à voir les trois assortiments. Il va choisir et vous pourrez entrer”. Elle prit les bijoux et partit. Monsieur Brouner attendit. Cinq minutes, sept minutes, dix minutes. Un quart d’heure s’écoula. Combien de temps faut-il pour choisir un assortiment? Quelque chose avait dû arriver. Il sortit du salon et arriva dans le couloir. Au fond du couloir, il aperçut une porte ouverte vers laquelle il se dirigea. La pièce était remplie de livres du plancher jusqu’au plafond. Un vieil homme était assis devant un bureau jonché lui aussi de livres empilés les uns sur les autres. Il portait un pince-nez et étudiait un livre. “Professeur Bourjikovski?”, interrogea Monsieur Brouner. Ce dernier leva son regard myope: “Oui”, répondit-il d’une voix sévère. Monsieur Brouner devint anxieux: “Je suis… Je suis Monsieur Brouner. Concernant la femme…”. Un sourire illumina le visage du vieux professeur. Un sourire d’acquiescement. Alors, tout allait bien. “Vous êtes Monsieur Brouner?! Alors, asseyez-vous donc! Racontez-moi comment cette histoire a commencé?” Monsieur Brouner sentit le plancher se dérober sous ses pieds. “Comment toute l’affaire a commencé. Elle m’a tout raconté”. “Qu’a-t-elle raconté?!”. “Elle était ici ce matin et me raconta qu’un fou de Varsovie, Monsieur Brouner, lui courrait après en exigeant qu’elle lui rembourse un million de Zloutim! Elle vint chez moi car je suis neurologue. Je lui ai dit que je n’avais pas de remède miracle. Je dois parler au patient, pénétrer dans les recoins de son âme, dans son inconscient. Alors elle m’a dit qu’elle l’amènerait… Eh, que se passe-t-il, qu’avez-vous? Levez-vous, réveillez-vous…de l’eau, apportez de l’eau!!!”
Méditons un peu sur cette histoire; un homme est dans son magasin, il est riche, respecté, tout lui réussit (comme nous?). Une cliente prometteuse entre dans le magasin devant laquelle il étale tous ses trésors (le mauvais penchant?); puis il sort de son magasin et se rend chez le professeur (le Monde Futur?) pour recevoir le paiement (le Gan Eden?); soudain, il s’avère qu’il est tombé dans une embûche… Le midrache sur notre paracha (Béréchit Raba 93-10) est clair à ce sujet: quand il leur dit “Je suis Yossef”, ils ne purent lui répondre car ils furent frappés de stupeur. Pourtant Yossef ne leur exprima aucun reproche verbal. Ils étaient persuadés que les rêves de leur frère n’étaient que l’expression de son désir de domination. Ils pensaient qu’ils devaient l’éliminer de leur chemin. Cependant, avec ces deux petits mots, il leur ouvrit les yeux: ils réalisèrent qu’ils avaient tort depuis le début: ses rêves étaient prémonitoires et n’exprimaient aucune mauvaise intention! Soudain, le rideau se leva devant leurs yeux stupéfaits! Que dire de nous quand l’Eternel en personne viendra nous réprimander pour ce que nous sommes vraiment…
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